Ah, le vaste sujet ! Que de soucis avec ces satanés carburateurs anglais ! Et pourtant, en état de marche et bien réglés, ils fonctionnent du tonnerre ! Voyons comment leur redonner toute leur efficacité.






1 - le fonctionnement des carbus SU (Skinner's Union) et ZS (Zenith-Stromberg)

Pour bien comprendre comment régler un SU ou un ZS, il faut en connaître le fonctionnement, qui diffère totalement de celui des carburateurs dits classiques, que l’on trouve sous le capot des voitures françaises, par exemple, à la même époque. Ces carburateurs sont dits à “dépression constante” ou encore à “buse variable”.
Ces deux types de carburateurs fonctionnent en utilisant la dépression qui règne dans le collecteur d’admission. L’idée très ingénieuse qui réside dans ces carburateurs consiste à constater que la quantité d’essence nécessaire est fonction de la quantité d’air fournie sont toujours, pour un moteur donné, régies par une loi invariable. Cette loi, c’est le profil de l’aiguille qui la détermine.

En effet, qu’on ait affaire à un SU ou un ZS, on trouve dans ces carburateurs un boisseau auquel est fixée une aiguille profilée qui plonge dans un gicleur. Le boisseau, dont la face supérieure est reliée au collecteur d’admission, se soulève sous l’effet de la dépression, qui est fonction de l’ouverture du papillon des gaz (c’est à dire fonction de l’enfoncement de la pédale d’accélérateur), permettant à plus d’air d’entrer dans le moteur. Dans son ascension, le boisseau entraîne vers le haut l’aiguille conique, qui coulisse dans un gicleur cylindrique, découvrant ainsi une section (de forme annulaire) plus grande et permettant à plus de carburant d'être aspiré par la dépression.

Ce petit film vous montre, sur un SU, le boisseau qui est aspiré par la dépression, l’aiguille qui se soulève et l’essence aspirée par le moteur, en quantité d’autant plus importante que le boisseau est haut. Appréciez, au passage, le bruit typique des carbus à dépression !







Encore mieux, un SU filmé en action à l’entrée du carburateur :





Et c’est tout ! Ce fonctionnement est simple et logique ! Les autres dispositifs du carburateur sont destinés à corriger la composition du mélange dans des conditions particulières (accélération, départ à froid, aspiration d’air chaud, etc.). Par exemple, sur les SU HS6, l’enrichissement à froid (”starter”) est constitué par un système qui abaisse le gicleur, augmentant le débit de carburant sans changer la hauteur du boisseau, augmentant automatiquement la richesse du mélange. Certains ZS ont un “compensateur de température”, admettant un surplus d’air lorsque la température monte, compensant ainsi la diminution de la densité de l’air admis ou la variation de viscosité du carburant. Enfin, le fameux “dash-pot”, qui doit toujours être convenablement rempli d’huile, est une sorte de “frein hydraulique” à la montée du boisseau : lors d’une franche accélération, le boisseau est freiné dans son ascension, mais la dépression en aval est forte, donc l’air sous le boisseau accélère, la dépression sous le boisseau augmente et la quantité de carburant aspiré est momentanément augmentée. C’est la “pompe de reprise” des carburateurs dits classiques. Puis, dans un laps de temps très court, le boisseau retrouve sa position normale, la dépression au niveau du gicleur diminue et la quantité de carburant injecté redevient normale.

Vous l’aurez compris, c’est le profil de l’aiguille qui détermine, pour chaque hauteur du boisseau, la quantité d’essence. C’est ce qui explique que chaque auto, chaque moteur, chaque millésime, en fonction des réglages du moteur, des accords des conduits d’admission et d’échappement, des profils de cames et de quantité d’autres paramètres, ait son profil d’aiguille. Il en existe plusieurs milliers... L’aiguille était soigneusement choisie au cours de nombreux essais couvrant toutes les conditions de fonctionnement.




2 - L’état mécanique

Pour qu’un carburateur SU (ou ZS) fonctionne correctement, il doit être en bon état mécanique. L’équilibre soigneusement réglé par le profil de l’aiguille peut être perturbé par des excès ou manques d’air ou d’essence inopportuns.
L’axe du papillon ne doit pas avoir de jeu dans le corps du carburateur, l’aiguille doit être propre, pas tordue ou rayée. Les divers joints doivent être présents et en bon état (ni craquelure ni fissure). Sur les SU, les gicleurs doivent pouvoir coulisser de bas en haut sous l’effet de la commande de starter. Sur les ZS, la membrane doit être en bon état (pas déformée, pas distendue, pas trouée) et bien en place (attention au détrompeur dans le corps du carburateur). Changer impérativement les pièces en mauvais état. Ces pièces sont toutes disponibles sur le site du fabricant original de ces carburateurs : www.sucarb.co.uk.




3 - les réglages

De ce fonctionnement découlent deux conséquences incontournables. D’une part, le profil de l’aiguille étant invariable, un réglage sur un point de fonctionnement conditionne le réglage du moteur dans tous les cas de fonctionnement du moteur. Bien entendu, c’est le plus commode qui sert de référence de réglage : le ralenti. D’autre part, si le ralenti est convenablement réglé et que le moteur n’a pas un fonctionnement satisfaisant, c’est que soit l’aiguille est inadaptée, soit le carburateur est défectueux.

Les carbus SU et ZS des Amazon possèdent un réglage de la richesse (ce qui ne sera plus le cas plus tard, sur les 140, à cause des normes de dépollution). Le principe du réglage est de faire varier la position du gicleur pour régler la quantité d’essence aspirée. Ce réglage influe sur toute la plage de fonctionnement du moteur. L’altitude du gicleur est réglable par une vis située en partie inférieure du carburateur. Le point de réglage sera donc le ralenti, chaud pour être dans les conditions de fonctionnement “normales”. Pour s’affranchir, dans un premier temps, des influences des commandes du (des) carburateur(s), les tringleries seront desserrées (accélérateur et starter). Dans le cas des doubles carbus, il faut aussi desserrer la barre reliant les deux carbus par les axes de papillon.

Retirer le ou les filtres à air. Avant tout réglage, il faut s’assurer que l’aiguille est correctement positionnée par rapport au boisseau.
Sa base doit arriver à fleur du boisseau. Si ce n’est pas le cas, il faut ouvrir la cloche du carburateur, retirer soigneusement le boisseau, dévisser la vis de blocage sur le coté du piston et repositionner l’aiguille. Ensuite procéder à un positionnement grossier du gicleur.








Sur le ZS, le réglage de base s’opère ainsi : desserrer le contre-écrou, visser la vis jusqu’à ce que le gicleur touche le boisseau (c’est la position la plus haute). Pour vérifier que le gicleur est bien en position haute, retirer le filtre à air et soulever le boisseau délicatement. Le gicleur est alors visible. Il doit affleurer le pont. Ensuite, dévisser de un tour et demi pour obtenir une position de départ pour un réglage fin. Sur le SU, le réglage de base est de deux tours et demi (quinze pans), après avoir monté au maximum le gicleur comme précédemment.
Il faut maintenant positionner correctement le papillon des gaz. Assurez-vous que la vis de ralenti accéléré ne touche pas sa came. Dévisser la vis de ralenti jusqu’à ce qu’elle ne touche plus la came ou le levier. Ensuite, la revisser à fleur puis visser un tour et demi. C’est, là aussi, un réglage de base, qu’il faudra affiner.

Ensuite vient le réglage fin de la richesse. Le principe, utilisé pour tester la richesse est simple. Il consiste à soulever délicatement le boisseau (avec un petit tournevis) d’environ 1 mm. Ceci apporte un supplément d’air à dépression identique. Sur les SU HS6, un petit poussoir est prévu pour cette opération. Suivant la réaction du moteur, on agit sur la vis de position du gicleur :
- si le moteur accélère, le mélange est
trop riche : il faut visser la vis de richesse (remonter le gicleur)
- si le moteur cale, le mélange est
trop pauvre : il faut dévisser la vis de richesse (descendre le gicleur)
- si le moteur reste stable ou augmente très légèrement de régime après une légère accélération, le mélange est correct.







Lorsque le réglage est correct, serrer modérément l’écrou de blocage sur les Zenith-Stromberg. Ensuite, affiner le régime de ralenti avec la ou les vis-butée de papillon (environ 850 tours/min). Il est conseillé, dans le cas des double carburateurs, d’utiliser un outil permettant de mesurer le débit d’air aux carburateurs (type CarBalancer, SynchroTest, ou tuyau de caoutchouc au bout duquel on écoute le bruit de succion) afin de régler les deux papillons de manière identique (même débit sur chaque carburateur au ralenti). Enfin, régler le ralenti accéléré : tirette retirée d’environ 15 mm, la vis doit toucher la came. Sur les ZS, la vis doit être en face du trait et le régime d’environ 1300 tours/min. Pour être parfait, toujours dans le cas des double carburateurs, le débit d’air sous starter doit être identique sur les deux carbus.

Reconnecter la barre de commande en tout dernier, en réglant sa longueur afin qu’elle n’influe pas le ralenti (laisser un léger jeu à l'attaque des commandes des carburateurs). Vérifier que les deux boisseaux, lors d’une accélération, montent de manière synchrone. Remonter les filtres à air.





Outils de mesure du débit d’air des carburateurs





Méthode Volvo pour le réglage des carbus SU


Réglage de base

  1. insérer une jauge d’épaisseur de 0,5 mm en A (fig 1). Desserrer la vis de ralenti accéléré et la vis de ralenti (2 et 3, fig 2) de sorte que les papillons soient totalement fermés.
  2. Desserrer les écrous (3 et 9, fig. 1) et pousser l’extrémité des bras (2 et 8, fig 1) en arrière de sorte que les entraineurs soient juste en contact avec la dent inférieure du créneau de l’axe de carburateur (1, 10). Ne pas pousser trop fort, au risque d’ouvrir les papillons. Serrer les écrous (3 et 9) dans cette position. S’assurer que l’axe d’entrainement peut être bougé en avant et en arrière légèrement. Il ne doit pas être pincé par exemple par les bras (2 et 8) installés trop près des carburateurs.
  3. Retirer la jauge d’épaisseur. S’assurer qu’en basculant la commande les deux papillons sont entrainés simultanément.
  4. Visser les vis de ralenti (fig 2) de sorte qu’elles affleurent les bras des papillons quand ceux-ci sont fermés. Visser les vis d’un demi tour supplémentaire.
  5. Ajuster grossièrement la hauteur des jets en les vissant tout d’abord en position haute maximum, puis les desserrer d’un tour et demi. Procéder de la même manière sur les deux carburateurs.
  6. Remplir les amortisseurs des carburateurs avec de l’huile. Employer de l’huile SAE20 (pas multigrade). Faire attention à ne pas faire couler d’huile autour du réservoir. Monter un compte-tours de précision sur le moteur, le démarrer et le laisser chauffer.


Réglage

  1. Régler le régime du moteur à 600-800 rpm pour le B18B et à 500-700 rpm pour le B18D avec les deux vis de ralenti. Vérifier à l’aide d’un synchrotest que le débit d’air au travers des carburateurs est identique.
  2. Ajuster les deux vis de sorte que les débits à chaque carburateur soient identiques et que le régime de ralenti soit atteint.
  3. Dévisser vers le bas l’écrou de réglage du jet d’un carburateur jusqu’à ce que le régime maximum soit atteint sur le compte-tours. Dévisser l’écrou de 1/6 de tour supplémentaire (un pan)
  4. Répéter le point 3 sur l’autre carburateur
  5. Enfoncer le dispositif de levée du boisseau d’un des deux carburateurs et vérifier que le régime diminue.
  6. Répéter le point 5 avec l’autre carburateur
  7. Si le réglage est correct, le régime doit tomber de 100 à 150 rpm, la même valeur sur les deux carburateurs. Si le régime descend trop quand on agit sur le carburateur avant, par exemple, c’est le carburateur arrière qui doit être enrichi, en descendant l’écrou de réglage.
  8. Vérifier et le cas échéant ajuster le régime de ralenti comme précisé au point 2.
  9. Monter les filtres à air et tester la voiture. Pendant le test, réaliser une vérification comme au point 5 et ajuster si nécessaire.






Réglage du starter et du ralenti accéléré

  1. Ajuster le système d’enrichissement de sorte que : le gicleur du carburateur avant commence à descendre lorsque la tirette au tableau de bord et tirée de 20 mm et le gicleur du carburateur arrière commence à descendre lorsque la tirette est tirée de 30 mm.
  2. Les vis de ralenti accéléré doivent être réglées lorsque la tirette au tableau de bord est complètement enfoncée. Pour le carburateur avant, la distance entre la vis et la came est de 0,1 à 0,3 mm. Pour le carburateur arrière, la distance entre la vis et la came est de 0,3 à 0,5 mm.



4 - Réfection

Lorsque les carburateurs sont trop usés, il faut passer par une réfection en profondeur. Généralement, les points les plus usés sont les axes, les alésages dans lesquels porte l'axe, les gicleurs et l'aiguille.

Il existe deux kits de réfection pour les carburateurs SU et Zenith-Stromberg : le
Service Kit et le Rebuild kit. Le Service Kit permet de changer le jet, le pointeau et son siège et les joints principaux (numéros dans un rond noir et dans un rond blanc). Le Rebuild Kit permet, en plus, de changer l'axe, le papillon et de supprimer les prises d'air par les portées de l'axe (numéros dans un carré noir).


Source : www.sucarb.co.uk



Pour changer les bagues, il est préférable de faire appel à un tourneur-fraiseur qui saura réaléser les corps des carburateurs et enfoncer les bagues parfaitement. Ainsi l'axe pivote sans jeu (le réglage du carburateur est stable) et sans prise d'air parasite. Voici ce que donne une rénovation des axes et des bagues :









B18D équipé d’un filtre à air double en tôle spécifique au marché français